~ Histoire : « Je vais mourir ? »A cette question, l’homme reste silencieux, incapable de répondre de manière franche à la petite fille de dix ans qui lui faisait face, les yeux indéniablement secs. Il s’était attendu à des pleurs, à des cris de protestations, à des accusations de mensonges, à des hurlements déchirants, mais rien ne s’était produit…
Incapable de pleurer, incapable même d’exprimer sa douleur face à la vérité qui lui sautait à la figure, s’agrippant de toutes ses forces à son visage et plantant ses griffes emplies de venin dans sa chair, elle le regardait, attendant qu’il ouvre la bouche… Mais pour lui dire quoi ? Comme dire à une si petite fille qu’il ne lui restait que très peu de temps à vivre ? Qu’aucune médecine, qu’aucune technologie n’était capable de la guérir et que, malgré les médicaments qu’elle prendrait et qui auront des effets secondaires peut-être encore pires que la maladie, elle ne prolongerait sa vie que de quelques années seulement ?
Comment pouvait-il, en sa qualité de père, lui avouer une telle atrocité ? Qui lui avait mis un tel fardeau si les épaules ? Si, étant plus jeune, il avait su que sa profession de médecin le pousserait à devoir prononcer ces mots qu’il redoutait tant à son enfant, jamais il ne se serait lancé dans cette voie.
Il baissa la tête. Il ne pouvait pas la regarder. Lui-même n’acceptait pas la réalité, alors elle… Elle n’était qu’une enfant, une petite fille, et la mort ne devrait pas la guetter aussi tôt. Elle ne devrait pas être aussi proche. Sa mère était déjà morte en la mettant au monde, atteinte, elle aussi, d’un cancer et étant incapable de supporter l’accouchement, et voilà que sa fille la suivait, à peine dix ans après son décès. Lui criait à l’injustice et elle ne disait rien. Les rôles n’auraient pas dus être inversés ?
« Oui… Mais pas tout de suite. Peut-être que tu vivras encore quinze ans, peut-être moins. Nous allons tout faire pour retarder la progression de la maladie. Tu devras prendre des médicaments tous les jours, tu auras à supporter les effets secondaires, mais tout ça, ce sera pour ton bien… Est-ce que tu comprends, Sue ? »La petite fille hocha la tête, souriant gentiment à son père.
« Je comprends Papa… Alors, s’il te plaît, ne pleure pas. »Les doigts de sa fille frôlèrent son visage, effaçant les quelques larmes qui avaient trahi sa tristesse et sa faiblesse face à cette situation.
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Les années passèrent. Cédant à tous ses caprices, son père accepta, après de nombreux refus, de la laisser pratiquer l’athlétisme. Elle s’essaya à toutes les disciplines qu’on pouvait lui proposer, désireuse d’emmagasiner les expériences dans le peu de temps qui lui était accordé.
Ce fut après être passée par le saut à la perche, le saut en longueur et toutes les sortes de course, qu’elle opta pour le saut en hauteur et le cent mètres, ignorant ses poumons qui criaient au supplice et lui demandaient d’arrêter les efforts trop intenses qu’elle fournissait pour eux. Pourtant, le travail de son souffle lui fut bénéfique et les médecins constatèrent, au bout de quelques années, une amélioration, minime, mais qui, pourtant, fut accueillie avec joie par son père.
Comme tous les enfants, elle alla à l’école où elle se fit de nombreux amis qui changeaient sans cesse. Soucieux de ne pas voir des signes de tristesse chez son enfant, son père l’envoya chez un psychiatre avec qui elle se lia d’amitié.
« Qu’est-ce que le bonheur pour toi ? »
« Le bonheur ? Une chose bien trop éphémère et illusoire pour que l’on puisse le garde auprès de soi. »
« Auprès de soi ? Comme un animal ? »
« J’imagine, oui. »Si le bonheur était une chose en laquelle elle était incapable de croire, elle s’accrochait, cependant, désespérément à la vie, refusant de devenir l’un de ces personnages mélodramatiques qu’elle croisait dans ses livres de contes. Persuadée que si elle se laissait aller, sa maladie gagnerait du terrain, elle cessa d’y penser aussi souvent que possible, lui faisant obstacle et essayant tant bien que mal de l’occulter.
Pourtant, elle visita tous les hôpitaux de la ville, son père étant persuadé que les médecins faisaient mal leur travail et l’école lui fut interdite l’année de ses treize ans. Elle était trop faible pour s’y rendre et trop fatiguée pour suivre ses cours, les effets secondaires des médicaments qu’on lui faisait prendre la privant de ses forces et la rendant vulnérable. Elle était constamment sur les nerfs, s’énervant pour tout et pour rien, regrettant dès qu’elle les prononçait les paroles qui s’échappaient de ses lèvres pour frapper n’importe qui.
De son père aux infirmières en passant par les médecins chargés de prendre soin d’elle, personne n’échappa à sa mauvaise humeur et à son exaspération de se voir si faible. Ce fut cette même année qu’elle décréta qu’elle refusait désormais de prendre les médicaments qu’on lui imposait.
Rien ne changea sa décision, que ce soient les menaces ou les supplications, elle s’obstinait à ne pas vouloir prendre ce qu’on lui donnait et, au bout de quelques mois, si la maladie avait réussi à lui voler un peu de son temps, son visage avait repris ses couleurs et elle sentait que ses forces revenaient.
On l’autorisa à retourner à l’école où elle excella dans tous les domaines et, si l’athlétisme lui fut à tout jamais interdit, elle s’orienta vers la musique, ignorant les réticences de son père face à son entêtement et son insouciance malgré son cancer. Rien ne devait perturber sa progression et son développement, pas même celui qui s’occupait d’elle et qui avait tous les pouvoirs sur sa pauvre petite personne.
« Qui es-tu réellement ? »Lui demanda un jour son psychiatre alors qu’elle s’en allait. Elle se retourna et sourit.
« Je vous l’ai déjà dit. Une simple personne de passage dans votre cabinet. »Et elle ferma la porte.
Les crises se déclenchaient à intervalles réguliers. Il lui arrivait d’avoir deux mois de répit avant qu’elle ne s’effondre à nouveau pour se relever à chaque fois et continuer sa vie normalement, comme si rien ne s’était passé, au grand damne de son père qui était terrorisé à l’idée de perdre son seul enfant.
Il finit par se remarier à une femme que Sue n’appréciait que peu et qui apporta avec elle un enfant, de deux ans son cadet. Son nouveau petit frère la détestait et le montrait ostensiblement. Il la considérait comme un fardeau qui empêchait sa mère d’être vraiment heureuse avec son nouvel époux et ce fut ses sarcasmes permanent rejetant la faute des problèmes familiaux auxquels ils se heurtaient qui poussa Sue à vouloir entrer dans un pensionnat.
Pourtant, cette demande ne lui fut pas accordée et elle dû continuer à se rendre à l’école, encaissant sans broncher les brimades de son frère. Ce parfait drôle avait été pris d’une haine aussi soudaine que despotique à son égard et jamais il ne tenta de l’expliquer clairement à sa sœur. Tout au plus, sa mère n’était qu’une vague excuse et elle comprit bien vite que sa seule présence irritait son cadet.
Quelques temps après, elle reçut une lettre qui lui proposait de rejoindre une école. Le document n’avait rien d’anormal, mais elle eut beaucoup de mal à lui accorder un semblant de crédit. Il ne s’agissait que d’une énième farce de son nouveau frère pour la faire quitter le domicile familial. Pourtant, lorsque, deux jours plus tard, elle se retrouva confronter à une luxueuse voiture noire, elle trouva que la plaisanterie allait un peu loin. Elle accepta cependant d’entrer dans l’habitacle malgré ses réticences et, après s’être endormie, elle se retrouva devant un établissement qu’elle n’avait jamais vu auparavant.
~ Autre : Le père de Sue était d'origine anglaise et sa mère japonaise. D'où son nom et son prénom à connotations anglaises.
~~~~~~ Comment avez-vous découvert le forum? Euh... Un parteniariat je crois.
~ Étiez-vous sur l'une des anciennes versions? Nop.
~ Avez-vous des questions ou des suggestions? Aucune.
~ Le forum vous plait-il? Non, c'est une véritable horreur. Pourquoi me suis-je donc inscrite ? T^T .
[Et voilà ! Désolée pour l'attente >< ].