20 ans et 42 jours
Essai : Mémoire Sélective - Chapitre 1, Derniers instants
- Commentaire audio de l'auteur a écrit:
- À l'époque, je venais de débarquer sur le site de RP, entre autres, arcanes.org pour jouer à la demande d'une amie (qui traîne d'ailleurs dans le secteur) le frère de son perso, Aérie. J'ai donc créé avec son aide Aelthan, perso d'elfe psychopathe qui a eu un certain succès... Tellement que je me suis dit que ce serait intéressant de fouiller dans son passé. Je vous ferais lire les différents chapitres au fur et à mesure, mais commençons par le commencement et ces derniers instants qui se terminent par la première ligne de mon RP là bas... Simple précision : dans cet univers, Palidor est le dieu des culs bénits we are the world we are the children amour et paix et Dorenovia déesse du sang, de la violence et de la luxure totale et complète.
"Aelthan... Aelthan, écoute-moi..."
Nous flottons dans un halo blanc. Ma soeur me regarde avec un grand sourire. Elle semble pure et immaculée, mais je vois bien dans ses yeux qu'elle a participé à des choses bien lointaines de l'innocence. Je ne connais que trop bien cette lueur. Mes yeux me la rejettent chaque fois que je croise mon reflet.
"Tu es tout près, cher frère... Ta quête se terminera aujourd'hui... Nous nous retrouverons bientôt... J'ai beaucoup de choses à te montrer, de personne à te présenter... Je vais avoir besoin de toi... C'est aujourd'hui... Réveille-toi, Aelthan... Maintenant."
J'étais tiré de mon sommeil d'un coup, essoufflé, en sueur. Aujourd'hui ? Je n'y croyais pas. Après ses longues années...
Peut-être j'entre un peu vite dans le vif du sujet. Mais dois-je vraiment me présenter ? Au fond, mon âge ou mon nom n'ont aucune importance. Ce n'est pas ce qui m'a fait me réveiller, ce matin, dans un lit de feuilles, en plein milieu d'une forêt millénaire pour me coucher, ce soir, sur un lit molletonné, une succube à mes côtés, dans une crypte sans fond. Il y a une histoire. Celle d'un elfe, chassé de chez lui il y a d'innombrables lunes, parti chercher sa vengeance, et retrouver la seule personne qui n'ait jamais su le comprendre. Cette histoire là, c'est celle que je vais essayer de vous raconter, au fil de ces quelques pages, bien trop curieux visiteurs de ma modeste chambre. Enfin, pour l'instant, reprenons où je me suis laissé. C'est à dire dans les feuilles.
Je me levai en grande hâte, m'époussetai. Je n'avais jamais connu un tel état d'excitation. Le feu de la veille était éteint, et je n'avais franchement ni envie de me salir les mains à le réactiver, ni envie de perdre mon temps à en rallumer un neuf. Pourtant, il me fallait déjeuner et avancer... Hors de question, si je retrouvai ma soeur aujourd'hui, de me montrer dans un état de faiblesse. La prochaine ville était à trois lieux et quelques. Je n'avais pas le choix. Les meilleures méthodes sont encore les plus classiques... Je repris mon chemin, d'un pas lent. Silencieux. Une lieu. Deux lieux. Soudain le bruit que j'attendais. Je filai me cacher dernière le premier buisson. Je lui laisserai exactement cinquante mots.
Il avait une bonne tête, quoi qu'un peu grasse. Un humain, bien sûr. Une trentaine d'années. Le genre bon père de famille, qui passe son temps dans son petit champ, ou à faire du tissage. Premier pas devant moi. Je bondis silencieusement de ma cachette. J'espérais qu'il avait dit au revoir à sa femme et à ses enfants s'il en avait, avant de partir. Deuxième, je sortis ma dague, me préparai. Il n'avait rien entendu. Sans doute allait-il simplement faire une petite promenade, pour se détendre, ou chercher un peu de bon bois pour son feu. Troisième pas. Là, il avait déjà la dague sur la gorge. Et posa la question que toutes les victimes posent, stupidement, à cet instant.
"- Qui êtes-vous ? Que voulez-vous ?
- Mon nom est Aelthan. Je suis un elfe. Et il te reste encore quarante-quatre mots à vivre."
J'adorais les regarder en cet instant. La terreur dans leurs yeux. Leur souffle, qui s'accélérait vite. Ils se sentaient tous si minables, pris comme des bleus. Oh, il aurait pu se défendre. Mais dans la peur, mais le plus grand des humains fait preuve d'une couardise dépassant l'entendement.
"- Non... Je... Prenez tout ! Ma bourse, mes bagues, mais laissez-moi partir, je vous en supplie.
- Vingt-huit, attention, tu gâches un précieux capital. J'allais le faire de toute façon, heu... Quel est ton nom ?
- ...
- Vingt-sept, vingt-six..
- Non, attendez ! Damerien... Mon prénom est Damerien.
- Damerien. Bien, je ne vais pas compter cette phrase. Vois-tu Damerien, tu as beaucoup de chance, aujourd'hui. Est-ce que tu sais pourquoi ?
- Non...
- Non, bien sur. Aujourd'hui, je vais retrouver ma soeur. Ça fait au moins quarante de vos années humaines que je la cherche. Tu te rends compte ? Quarante hivers, et je la retrouve aujourd'hui...
- ...et en quoi ça me concerne ... ?
- Hé bien Damerien, c'est simple. Comme tu es peut-être ma dernière victime avant un certain temps, je te ferai l'extrême luxe de t'offrir une mort rapide et sans douleur. Tu peux me remercier maintenant.
- ...
- Hé bien, tu préférerais peut-être que je te torture quelques heures, en te perçant les globes oculaires, le ventre, ou d'autres parties encore plus douloureuses, mais pas mortelles ?
- Qu'est-ce que je vous ai fait ?"
Sa voix était emplie de larmes. Oh non, autant chez les femmes j'aime ça, autant je déteste entendre un homme pleurer.
"- Damerien, est-ce que tu sais pourquoi j'ai dû partir de chez moi il y a quarante ans ? Non. Pourtant, c'était ta faute.
- C-comment ça... ?
- Des humains ont attaqué mon village. Et j'ai dû fuir. Et pourtant, nous n'avions rien à voir avec eux.
- Ce n'était pas moi...
- Oh... Ce n'était pas toi ? Sans doute ton père alors. Ou un autre membre de ta famille. Et tu paieras pour eux. Comme tous les humains que j'ai pu tuer jusqu'ici. Tu payeras pour leurs crimes, leur imbécillité, leur couardise. Pourquoi nous avoir attaqués pour votre petite guerre de rien, alors que vous êtes si lâches, faibles. Si pathétiques, si bas et bons à rien, si...
- VOUS, LES ELFES, MAUDITE BANDE DE..."
Un geste vif. Une giclée de sang macula le tapis brun et orange de terre et de feuilles mortes. Il tomba d'abord à genoux, puis vacilla un court instant, avant de s'étaler de tout son long.
"...cinquante..."
J'ai essuyé ma dague dans ma cape. Récupéré mon butin. Et je l'ai laissé là. Ce qu'il ne saura jamais, c'est que je l'ai uniquement épargné pour gagner du temps. Sa bourse était effectivement bien remplie. Ajoutée aux deux bagues et à son tour de cou, j'avais largement gagné mon repas. Mais si la plus grosse bague n'avait pas été aussi serrée, j'aurais pu m'épargner de devoir lui découper un annulaire et de me salir finalement. Les victimes manquent profondément de respect, de nos jours. Il me fallut jusqu'à midi pour rejoindre le village et sa taverne. C'était aussi bien mon lieu d'enquête que mon lieu de chasse, mais pas de temps pour les loisirs cette fois. Je pense que personne ne m'a remarqué quand je suis entré. Dans les tavernes, on a l'habitude de voir défiler une certaine faune, à longueur de temps.
Je me suis assis au comptoir, attendant que celle prenant les commandes daigne m'accorder quelque attention. Mes yeux firent le tour de l'assemblée, pour le moins hétéroclite. Une bande de nains parlait avec agitation au fond, et un serveur faisait d'incessants allez-retour pour remplir leur choppes. Des demi-elfes, à une autre table... Voilà bien à mon sens le gâchis le plus inacceptable. Comment pouvions-nous nous mélanger à... Enfin. Quelques elfes, des humains, même des orcs et des gobelins. Un peu plus, on se serait cru à une de ses réunions ridicules de certains fanatiques de Palidor, essayant de nous faire croire que chaque race est égale.
"- Mon mignonnet, qu'est ce que je te sers ?"
Volte-face. Elle était très belle, quelques rondeurs, mais globalement rien à jeter. Je lui ai offert mon sourire le plus charmeur.
"Je cherche une certaine demoiselle Aérie. Se trouve-t-elle par ici ?"
Le visage de la serveuse tomba en berne, la bouche légèrement béante, alors que le volume des conversations derrière moi baissa très nettement. Je vis une série d'émotions assez peu rassurantes filer dans ses yeux. Ma soeur semblait s'être fait une sacrée réputation dans le quartier. La commerçante reprit un sourire forcé avant de répondre.
"- Ça, étranger, c'est vraiment pas une bonne idée. Pense à autre chose. Un peu d'hydromel ?
- Juste un doigt."
Joignant le geste à la parole, je posais sur le comptoir l'annulaire récupéré peu avant. Peut-être consentirait-elle à me répondre désormais.
"Je ne sais pas si j'ai été assez clair. Je cherche demoiselle Aérie."
Le silence était désormais total et même les nains avaient cessé de boire. La serveuse avait une mine pâle et horrifiée. Elle n'était plus capable de dire un mot visiblement. Derrière moi, j'entendis une chaise racler le sol. Une succube, qui hésitait visiblement encore entre sa forme femme et sa forme démoniaque (mais au fond, est-ce si différent ?) s'approcha de moi. Sa voix par contre était douce et charmeuse.
"- Et qui êtes-vous exactement, pour demander à la voir ?
- Son frère."
Un grand sourire apparut ses le visage de la succube, qui pris pour de bon les traits d'une très, très charmante dame. Mais ce fut bien le seul. Aux quatre coins de la taverne, les visages fondirent un par un. Quelque soit leur race, la plupart des occupants me regardèrent comme un pestiféré. Mais qu'avait-elle bien fichu pour faire passer un tel frisson dans chaque personne à sa simple évocation ? Peut-être pas beaucoup plus que moi, mais bien moins discrètement...
"- Je vois... Vous la trouverez probablement dans les cryptes.
- Les cryptes ?
- Le lieu de prédilection des adeptes de Dorenovia ici. Demandez mes soeurs à l'entrée. C'est un peu à l'écart du village, mais vous devriez trouver facilement.
- Merci bien.
- Tout le plaisir est pour moi."
J'ai salué la taverne médusée d'un petit signe de la tête avant de sortir. Non seulement l'ombre de ma soeur allait visiblement planer sur ma réputation ici, mais j'avais aussi déjà l'impression qu'essayer de me montrer digne de ce nom allait me demander un bon paquet d'effort. Je me doutais déjà que le temps l'avait bien changée, elle aussi. Mais je ne savais pas encore à quel point. Je commençais à peine à le réaliser, en fait... Et voilà enfin ces fameuses cryptes, face à une succube. Là où cette histoire se finit... Avant que j'en reprenne certaines lignes pour vous.
"Je cherche demoiselle Aérie. On m'a dit qu'elle avait fait de cet endroit son domaine. Pourriez-vous me dire où je pourrais la trouver ?"